NOS COUPS
DE CŒUR
Thèmes
Si éloignée en apparence, la Syrie n’émeut que lorsque les conséquences du conflit viennent endeuiller nos contrées.
Si proche pourtant, elle est le véritable centre géographique de notre histoire et ils sont nombreux ceux ayant arpenté le « chemin de Damas » pour élaborer ce que nous peinons souvent à voir comme un héritage commun.
Aveuglement volontaire ou non, il est désormais impossible de détourner les yeux du reflet que nous renvoie Damas. C’est notre avenir qui s’y joue.
Notre monde a abandonné la Syrie et son peuple à une horreur inimaginable. Et cette horreur ne semble nous toucher que par ses « effets collatéraux », les attaques terroristes menées sur notre sol. Pour qu’une telle indifférence soit devenue possible, il a fallu occulter tout ce qui dans l’histoire de la Syrie résonne dans notre propre mémoire. Croire qu’un tel désastre peut se poursuivre sur une terre qui nous est si proche est se rendre impuissant à anticiper d’autres tragédies jusque sur notre sol. Pour cette raison, il est urgent de renouer le lien avec la part de l’histoire universelle qui s’est déroulée là-bas, de l’autre côté de la Méditerranée.
Qu’on le veuille non, Damas nous tend aujourd’hui son miroir.
Dans ce livre alerte, inspiré, Jean-Pierre Filiu revisite le passé de ce pays meurtri, un passé si intimement mêlé au nôtre. Il évoque des figures que l’on croit familières, Saint-Paul, Saladin ou Abdelkader, et il en fait découvrir bien d’autres, du « chemin de Damas » à l’« Orient compliqué ». La Syrie, malgré les persécutions qui l’ont marquée, apparaît comme un havre de minorités, qui est allé – on l’ignore souvent – jusqu’à offrir refuge aux rescapés du premier génocide du xxe siècle, celui des Arméniens.
La descente aux enfers de la Syrie et de son peuple n’est ni une affaire d’Arabes, ni le solde de querelles immémoriales. Elle est épouvantablement moderne, car les bourreaux de ce temps, qu’ils soient jihadistes ou pro-Assad, n’invoquent un glorieux passé qu’à l’aune de leur projet totalitaire.
Nous avons tous en nous une part de Syrie. Dans le miroir de Damas, nous comprenons mieux ce que notre monde est en train de devenir. Car telle est notre Histoire, ici comme là-bas, là-bas comme ici.